La Politique Commune de la Pêche : la protection du loup de mer

Selon un guide publié par la WWF en 2016, un  Français mangerait en moyenne 20 kilogrammes de poisson par an, soit une consommation qui a doublé en 50 ans. 

Aujourd’hui, les ressources halieutiques sont très convoitées, on pense notamment  aux diverses espèces de poissons en proie à une surpêche, élément révélateur de notre société de surconsommation. La hausse de la consommation de poisson est d’autant plus alarmante qu’elle est combinée à  des chiffres de surexploitation impressionnante des stocks : 31% au niveau mondial et, rien qu’au  niveau méditerranéen, 93%. Autant dire que nous consommons bien plus que ce dont nous avons  besoin, et que ce que la nature a à nous offrir. 

Pour pallier la surpêche, l’Union européenne agit dans le cadre de la politique commune de la  pêche (PCP) qu’elle a mise en place dans les années 70. L’article 3 du Traité sur le fonctionnement  de l’Union européenne lui confère en effet une compétence exclusive en matière de conservation des  ressources biologiques en mer.

Une illustration de Baptiste Hamelin
La politique commune de la pêche : une politique de gestion des stocks de poissons

La PCP est définie par la Commission européenne comme « une série de règles destinées à gérer la  flotte de pêche européenne et à préserver les stocks de poissons ». Elle ajoute d’ailleurs que sa  conception relève de la gestion d’ « une ressource commune », qui intéresse tous les êtres humains  et relève d’un écosystème entier. Ainsi, il s’agit d’agir à l’échelle européenne pour la  conservation de ces ressources marines. La Commission est très transparente et précise que les  stocks sont limités voire surexploités, d’où son action préventive.  

L’un des quatre principaux domaines d’action de cette politique concerne la gestion des pêches. Il  s’agit plus précisément d’établir des quotas de pêche à ne pas dépasser, de sorte à maintenir les  stocks de poissons et d’éviter la disparition d’une espèce.  

L’Union européenne a agi notamment pour la protection des stocks de loups de mer. 

La protection du loup de mer : une espèce en déclin

C’est dans l’Atlantique Nord que le loup de mer, communément appelé bar, est de plus en plus convoité à but commercial ou récréatif. En 2020, il est le second poisson le plus cher sur le marché des espèces d’Atlantique Nord-Est,  derrière le homard européen : ceux pêchés par crochet ou ligne sauvage peuvent atteindre 35€ du  kilo. Le bar ne fait pas partie des espèces en voie de disparition, mais son stock diminue  considérablement. Il était relativement bas au début des années 90, jusqu’à descendre sous le seuil  de 5000 tonnes, niveau qui peut entraîner une sérieuse altération des capacités de reproduction. La courbe est repartie à la hausse en 1995 pour finalement rechuter en 2015. Ainsi, la protection du loup de mer est préconisée par nombre de scientifiques. 

La direction générale des affaires maritimes et de la pêche note les efforts de l’Union : « Le stock  Nord a été géré au niveau national jusqu’en 2015, date à laquelle des mesures d’urgence ont dû être  prises au niveau de l’UE pour rétablir l’état du stock en déclin. Depuis 2015, l’UE a adopté une  série de mesures tant pour la pêche commerciale que pour la pêche récréative, notamment des  limites de captures mensuelles, des limites de captures journalières et des périodes de fermeture. ».  

En quoi consistent concrètement les mesures prises par l’Union européenne ? En 2015 l’Union a  établi un maximum mensuel de prises par navire, variant entre 1000 et 3000 kilogrammes par  méthode de capture. Par exemple, les chaluts pélagiques* ne peuvent capturer plus de 1500  kilogrammes de loup de mer par mois. En 2019, la Commission européenne a imposé aux pêcheurs récréatifs de la Manche et de la Mer du Nord de ne capturer qu’un loup par jour entre le 1er avril et le 31 octobre. Ceux pêchant en Atlantique proche du Finistère avaient en 2020 un quota maximum de deux loups quotidiens par pêcheur. Cette politique a d’ailleurs été reconduite pour 2021. L’Union a également adopté une mesure d’urgence fixant à 42 centimètres la taille minimum des loups péchés. En effet, nombre de  poissons sont pris dans les filets alors qu’ils n’ont pas encore atteint l’âge adulte, ce qui fragilise la  possibilité de reproduction de leur espèce. Ici, l’Union vise à empêcher qu’un poisson n’ayant pas encore pu se reproduire ne soit capturé. Enfin, les filets fixes sont interdits depuis 2019 dans le  cadre de la pêche récréative, car trop peu sélectifs. Pour les pêcheurs récréatifs, l’Union va jusqu’à mettre en place des mesures de prévention contre la revente illégale : la nageoire caudale du bar débarqué à terre doit par être coupée pour le différencier des poissons vendus par les professionnels.

L’alternative : la pêche durable 

L’Union européenne, soucieuse de la conservation des ressources de la mer, a co-financé le projet  Fish Forward lancé par le WWF dont le but est de garantir une viabilité des poissons et crustacés en  triptyque : environnementale, économique et sociale. Avec onze pays adhérents, dont la France, le  projet a pour but de sensibiliser les citoyens, plus spécifiquement les consommateurs, à un  développement durable et responsable des produits issus de la mer.  

À l’heure actuelle, les choix des consommateurs sont aiguillés via des labels publics, notamment les  labels BIO (Agriculture biologique), MSC (Marine Stewardship Council) et ASC (Aquaculture  Stewardship Council).  

La WWF a répertorié diverses espèces de poissons à travers un code couleur distinguant les produits certifiés par des labels indépendants recommandés, ceux à favoriser, ceux à consommer avec modération et ceux à éviter. À titre d’exemple, on remarque que le thon est une espèce à consommer modérément voire à éviter dans la plupart des eaux.  

Si vous souhaitez contribuer à l’amélioration des stocks sans pour autant vous priver du plaisir de manger du poisson, le mieux serait tout simplement de réduire votre consommation et de privilégier les produits labélisés !

*Le chalut pélagique est une méthode de capture des ressources halieutiques. Il s’agit d’un filet remorqué à un navire de pêche, naviguant les eaux allant de la surface au fond. 

Sources

WWF, L’océan dans votre assiette, 2016
Commission européenne, Politique commune de la pêche (PCP)
Commission européenne, How is the EU protection sea bass ?
Commission européenne, Direction générale des affaires maritimes et de la pêche, Pêche  commerciale et récréative du bar sauvage dans l’Atlantique, Analysé économique et marchés, juin 2020
Commission européenne, Seabass – Market trends of one of Europe’s top fish, 2020
COUNCIL REGULATION (EU) 2020/123 of 27 January2020

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Cinq initiatives créatives et zéro déchet !

Un article d’Inanna Tribukait

Fin 2020, on connaît tous ce sentiment de “doomscrolling”, l’acte de défiler sur son écran, en lisant des nouvelles de plus en plus déprimantes. Pour cette raison, il est bon de regarder, de temps en temps du bon côté. Il existe des initiatives encourageantes qui ont le potentiel de vraiment faire une différence. 

Une illustration de Margot Jacq
Les Coiffeurs-Justes : des cheveux pour dépolluer les eaux

La plupart de ceux qui s’efforcent à vivre une vie plus durable et zéro déchet ont probablement déjà pensé à leur produits de soin capillaires. Ils utilisent peut-être une barre de savon, où un shampoing sans microplastiques, pour préserver les océans. Mais ils n’ont sans doute pas pensé qu’on pourrait aussi utiliser leur cheveux pour ce même but ! Thierry Gras, fondateur de l’association Coiffeurs Justes s’engage à recycler les cheveux et à les utiliser comme une matière novatrice pour remplacer le plastique. « En fait, c’est une matière qui a été très utilisée mais qui a été remplacée par le plastique », dit-il dans un reportage sur France 3. Un kilo de cheveux absorbe huit litres d’hydrocarbure, et on peut les transformer en filtres qui s’utilisent contre les déversements pétroliers. L’association collecte déjà des cheveux de plus que 3000 salons partenaires, pas seulement en France mais aussi dans les autres pays de l’Union Européenne.

Friendly Frenchy: des lunettes en coquillages Made in Bretagne

Sur la côte bretonne, une entreprise s’est dédiée à produire quelque chose qui est en même temps durable et représentatif de son origine littorale. “Friendly Frenchy” lutte contre les déchets alimentaires des restaurants au bord de la mer en fabriquant des lunettes de soleil à base de coquillages. Les coquilles sont normalement destinées à être incinérées ou enfouies, mais l’entreprise les réduit en poudre, et les convertit en plaques avant d’être transformées en des lunettes de soleil qui sont 100% biosourcées. Depuis 2016, l’entreprise a déjà converti plus d’une tonne de coquilles en lunettes ! 

REEEboot : Reconditionner des ordi via la réinsertion

A la fois social et durable, le programme REEEboot créé en 2017 par Pôle Emploi et l’Agence du Numerique a eu la bonne idée de reconditionner des ordinateurs.  Le programme entend aussi lutter contre la fracture numérique et aider à réintégrer des personnes durablement éloignées de l’emploi ou en situation de handicap dans le monde du travail. Le programme, qui a été lancé encore une fois au printemps 2020, a déjà travaillé avec différentes associations, comme l’association “Alternative urbaine”, une association d’aide à l’inclusion sociale et professionnelle qui mêle culture et tourisme à travers d’actions d’inclusion novatrices.

Crisp Packet Project : des paquets de chips aux couvertures de survie

Au Royaume-Uni, un incroyable projet mené par la communauté s’est développé à l’échelle nationale: il s’appelle le Crisp Packet Project. Ce projet permet de transformer des paquets de chips usagés en couvertures de survie et sacs de couchage pour les sans-abri. Les sachets de chips ont un revêtement argenté, ce qui fait d’eux le matériau idéal pour un sac de couchage, car ils conservent la chaleur corporelle. Excellente initiative étant donné que seuls 4 % des plastiques souple sont actuellement recyclés au Royaume Uni !  Le Crisp Packet Project reçoit des dons de la communauté, et transmet les sacs de couchage aux associations caritatives en faveur des SDF. Le projet s’est déjà étendu à la fois à l’Irlande et au Portugal, et il semble que d’autres pays sont à venir… A suivre ! 

Vuna : de l’urine pour les plantes  

En Suisse un autre projet est né. Au premier abord, il semble bizarre, et, soyons francs, assez dégoûtant. L’entreprise suisse Vuna produit de l’engrais à base d’urine humain. Selon leur site web, leur “Aurin” est officiellement autorisé comme engrais universel par l’Office fédéral suisse de l’agriculture. Produire l’engrais de l’urine humain économise de l’eau, en réduisant la quantité d’eau qui est nécessaire pendant la canalisation et contrairement aux engrais traditionnels, ne contient pas de métaux lourds.  De cette manière, on peut obtenir jusqu’à 70 litres d’engrais et 930 litres d’eau à partir de 1000 litres d’urine, qui suffit pour irriguer et mettre d’engrais sur 2000 mètres carrés de sol ! 

Sources: 

Delphine Aldebert , Henrique Garibaldi: Pollution: Quand les cheveux s’en mêlent
Sebastien Olland, Des lunettes en coquillages, BRUT
Reeeboot France
Nick Hughes, A Crisp Packet Revolution
Karin Jäger: Phosphor aus Urin – Das neue Gold?

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Climat : pas tous logés à la même enseigne !

Par Mélissa Michaud

Avez-vous déjà entendu parler de justice environnementale ? 

Si le concept commence à émerger en France, il existe depuis les années 1980 aux États-Unis. C’est dans la lutte pour les droits civiques que naît le concept ainsi que celui du racisme environnemental. L’idée est que, bien que nous soyons tous impactés par les changements écologiques, nous ne sommes pas tous égaux face à leurs conséquences. 

Une illustration de Margot Jacq

Le concept, et les luttes qui y sont liées, naît en 1982 suite à l’installation d’une décharge toxique dans le comté de Warren aux États-Unis qui a provoqué une forte mobilisation des habitant.e.s et conduit à un rapport mettent en exergue le lien entre déchets toxiques et race (en tant que construction sociale). C’est le révérend Benjamin Chavis, camarade de Martin Luther King, qui met en évidence l’existence de ce racisme environnemental dont il devient la figure fondatrice. Aujourd’hui, le père de ce mouvement est le Dr Robert Bullart qui écrit sur le sujet depuis 30 ans.

La fondation canadienne des relations raciales reprend les termes du Dr Robert Bullard et définit le racisme environnemental comme le :

« Terme qui fait référence au racisme systémique, c’est-à-dire à toute politique, pratique ou directive liée à l’environnement et qui touche différemment ou défavorise (intentionnellement ou non) des individus, des groupes ou des communautés en raison de leur race ou de leur couleur. Les gens de couleur, les groupes autochtones, les gens de la classe ouvrière et les personnes à faibles revenus se trouvent exposées de manière disproportionnée aux dangers environnementaux et aux risques que présentent des substances industrielles toxiques, l’air pollué, l’eau insalubre, les conditions de travail nuisibles à la santé et l’emplacement d’installations dangereuses et toxiques, telles que des incinérateurs et des décharges de déchets toxiques ».

En somme le racisme systémique trouve son pendant dans les problématiques écologiques : que ce soit à l’échelle mondiale ou très locale, les populations racisées, autochtones et les pays dits « du Sud » sont exposés de façon disproportionné aux risques environnementaux.

Le racisme environnemental, comme de nombreuses inégalités, a plusieurs visages et existe par le biais de plusieurs mécanismes.

Ainsi, il existe une inégalité entre les différents pays du monde. Typiquement, ce ne sont pas les États qui polluent le plus qui sont les premières victimes des conséquences de leur pollution mais plutôt les petits États insulaires. De même, le capitalisme conduit l’exploitation de ressources naturelles et l’accaparation des terres par des multinationales dans des pays dits du « Sud » ce qui conduit à priver les populations de leurs ressources et les expose à divers dangers (pollution des sols, de l’eau, de l’air, exposition à des dangers chimiques, etc). Enfin, certaines régions du monde sont les poubelles d’autres : on se rappellera qu’en 2018 la Chine a interdit l’entrée des déchets recyclables provenant de l’étranger sur son territoire. Depuis, c’est l’Asie du Sud-Est qui est la principale destinataire de ceux-ci. Les infrastructures y sont insuffisantes et peu adaptées au flux massif de déchets. Résultat : c’est l’incinération qui est majoritairement choisie entrainant des conséquences environnementales désastreuses. Depuis l’année dernière certains de ces pays décident d’ailleurs de renvoyer les tonnes de déchets des riches pays du Nord à leurs expéditeurs. 

En bref, le capitalisme et sa recherche constante du profit conduit à une dérégulation sociale et environnementale à laquelle sont plus exposés les pays qui bénéficient le moins desdits profits…

Une logique similaire se retrouve au sein-même des Etats.  On peut prendre l’exemple des Etats-Unis où les études sont les plus abouties et les exemples divers.
L’un des exemples les plus récents est la crise de l’eau à Flint où la population est principalement afro-américaine. Pour des raisons d’économie, il est décidé en 2014 que l’eau de la rivière Flint serait utilisée pour approvisionner la ville. Or, l’eau était polluée par les déversements de déchets d’usine et, plus grave, elle a rongé les canalisations en plomb contaminant l’eau par des niveaux toxiques de plomb. Cette substance chimique est dangereuse et peut causer des lésions cérébrales. Les organisations du gouvernement fédéral ont tenté de dissimuler cette exposition, il a fallu attendre 2016 pour que Barack Obama déclare l’état d’urgence. Pendant ce temps la population qui, rappelons-le, payait pour cette eau polluée, écopait de symptômes plus ou moins graves (allant de perte de cheveux, maux de têtes et vomissements aux troubles de développement du cerveau des enfants en bas âge).

En Louisiane un corridor de 135 kilomètres est tristement surnommé la Cancer Alley (allée du cancer) puisque s’y concentrent 150 usines et raffineries. Dans les petites villes qui s’y trouvent, et où la majorité de la population est noire, de nombreuses personnes ont développé des maladies respiratoires et des cancers.

Les catastrophes naturelles peuvent aussi illustrer ce racisme environnemental, l’Ouragan Katrina en est l’exemple le plus célèbre. Les quartiers noirs étant souvent dans les zones inondables 84% des personnes disparues lors de cet ouragan sont noires.

Il est plus difficile d’obtenir des chiffres en France puisque le sujet est peu étudié. Des exemples sont pour autant assez éclairants sur l’existence d’un racisme environnemental.

L’exemple le plus marquant est le cas du chlordécone aux Antilles.

Le Monde rappelle que le chlordécone est 

« un pesticide très toxique, utilisé massivement dans les bananeraies en Guadeloupe et en Martinique pendant plus de vingt ans à partir de 1972 pour lutter contre le charançon de la banane, un insecte qui détruisait les cultures. Le chlordécone est un perturbateur endocrinien reconnu comme neurotoxique, reprotoxique (pouvant altérer la fertilité), et classé cancérogène possible dès 1979 par l’Organisation Mondiale de la Santé. La France a fini par l’interdire en 1990. Le chlordécone a toutefois été autorisé aux Antilles jusqu’en 1993 par deux dérogations successives, signées par les ministres de l’Agriculture de l’époque. » 

Pire, des stocks illégaux ont été retrouvés en 2002 ce qui laisse à supposer que le pesticide a été utilisé bien après son interdiction. 

Aujourd’hui, 25 ans après, 18 000 hectares de terres sont contaminés en Martinique et Guadeloupe, soit un quart de l’ensemble des terres utiles des deux îles.  Les rivières et l’océan sont aussi contaminés ce qui a des conséquences économiques graves puisque la pêche est interdite dans certaines zones.

Les travailleurs agricoles sont les plus atteints mais la quasi-totalité de la population des îles fait face aux conséquences de cette inégalité environnementale. Une étude de 2013 de Santé Publique France, 95% des Guadeloupéens et 92% des Martiniquais sont contaminés. Cela sous-entend des risques élevés d’infertilité, des naissances prématurées et d’endommagement du système nerveux ainsi qu’une survenance augmentée du cancer de la prostate.  La Martinique détient par ailleurs le triste record du monde de la survenance de ce cancer (227 nouveaux cas par an pour 100 000 habitant.e.s).

Une dimension néocoloniale s’ajoute au scandale sanitaire. Effectivement, les propriétaires agricoles des terres concernées sont majoritairement issus de puissantes familles békés illustrant à nouveau l’idée que les corps abimés pour la production des profits ne sont pas ceux qui en profitent.

D’autres exemples peuvent être cités : les gens du Voyage sont souvent en première ligne face aux pollutions industrielles puisque les aires d’accueil sont dans des zones dégradées (à Rouen par exemple l’aire est à 500m de l’usine Lubrizol où l’incendie a eu lieu).  La « Jungle » de Calais se trouve elle en zone Seveso : la préfecture du Pas-de-Calais et la mairie de Calais y ont sciemment décidé le regroupement des migrants présents sur le territoire de la ville en 2015.

La Seine Saint Denis est le département le plus pollué de France, c’est aussi le plus pauvre et celui où les populations racisées sont surreprésentées. Ceci n’est pas une coïncidence. En effet, il est reconnu que la géographie sociale de la région parisienne est liée à la pollution de l’air et à l’orientation des vents : les pauvres à l’Est et les riches à l’Ouest. En 2003, lors de la canicule la Seine Saint Denis fait face à une surmortalité de +160% ce qui s’explique par les conditions de vie des habitants qui manquent d’espaces verts, subissent une bétonisation massive et la pollution de l’air.

Une étude de 2014 démontre qu’en France, chaque pourcentage supplémentaire de la population d’une ville née à l’étranger augmente de 29% les chances pour qu’un incinérateur à déchets y soit installé.

Si l’intersection entre classe sociale et appartenance à une ethnie marginalisée rend difficile le débat, freien les études en France, il n’empêche que le racisme environnemental est réel et qu’une convergence entre les luttes antiracistes et écologistes est nécessaire.

Le comité pour Adama Traoré et l’association écologique alternatiba ont incarné cette intersectionnalité en marchant ensemble lors des dernières mobilisations contre les violences policières. Leur volonté était à la fois d’inclure les quartiers populaires dans les mobilisations écologistes, de rappeler les valeurs communes aux mouvements (égalité, justice, respect de la dignité humaine), d’être plus visible et d’inscrire la participation des populations en première ligne des injustice et de la pollution dans la construction d’une écologie populaire.

Ces illustrations ne sont que des exemples d’une triste réalité qui, je l’espère, nous inviterons à nous renseigner plus amplement sur le sujet afin de permettre une prise en compte plus satisfaisante de la parole des premiers concernés par les changements climatiques et autres problématiques écologiques. Il est dans tous les cas urgent que nous sortions de l’entre soi écologique pour que les solutions s’appuient sur l’expertise des personnes directement intéressées.

Sources

Appel  ‘Marche IV – On veut respirer’ disponible sur les sites de Médiapart, Regards et Reporterre,
R. KEUCHEYAN, La nature est un champ de bataille, chapitre I. Racisme environnemental, 2018, p.19 à 84
L.LAURIAN, Environmental justice in France? A spatio-temporal analysis of incinerator location, Journal of environemental Planning and Management, Volume 57, 2040
C. LEVENSON, Le « racisme environnemental» aux Etats Unis va au-delà du cas de Flint, Slate, 2016
QUOC ANH, Le racisme environnemental à travers le prisme des rapports de dominations, Médiapart, 2020

Pour aller plus loin :

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Écoféminisme : pourquoi certaines femmes troquent le rose pour le vert ?

Un militantisme conjuguant univoquement féminisme et écologie, c’est possible !

Par Orlane Janvier

« Plus je lis sur la crise climatique, plus je réalise combien le féminisme est crucial. Nous ne pouvons pas vivre dans un monde durable à moins que tous les genres et les personnes soient traités également. ». En tweetant ces mots le 8 mars 2019, Greta Thunberg souligne l’indéniable lien unissant les militantismes écologique et féministe dont l’écoféminisme s’attèle à en faire le syncrétisme.  Quels sont les contours de ce mouvement ?

Une illustration de Baptiste Hamelin
Les prémices de l’écoféminisme : une conceptualisation française

Françoise d’Eaubonne est l’autrice de l’ouvrage Le féminisme ou la mort, titre entrant en écho avec celui du livre de René Dumont L’utopie ou la mort. Dans ce manifeste paru en 1974, soit deux ans après la publication du rapport Meadows, l’écrivaine et militante féministe mentionne et définit pour la première fois le terme d’« écoféminisme », contraction des mots écologie et féminisme. L’écoféminisme est un mouvement activiste qui cherche à mettre en exergue comment les hommes ont fait en sorte que la nature et les femmes deviennent les objets passifs de leur domination.

D’Eaubonne considère qu’une catastrophe écologique et démographique est imminente en raison d’une surpopulation croissante de la planète et de la destruction de ses ressources. Selon elle, cette double menace est le fruit de la domination masculine, du capitalisme et du socialisme. C’est ce qu’elle conceptualise sous l’expression de « lapinisme phallocratique » : « La destruction des sols et de l’épuisement des ressources signalés par tous les travaux écologistes correspondent à une surexploitation parallèle à la surfécondation de l’espèce humaine ».

Cependant, si l’écoféminisme est né sous une plume française, il se développe d’abord significativement aux États-Unis où la Conference for Women and Life on Earth en 1980 symbolise le début de la mobilisation écoféministe et de son enracinement outre-Atlantique. La même année débute les Women’s Pentagon Actions, autrement dit le rassemblement de plus de deux mille femmes autour du Pentagone revendiquant l’égalité des droits socio-économiques et reproductifs ainsi que l’arrêt de l’utilisation du nucléaire par le gouvernement américain.

Dans les années 80, l’écoféminisme gagne aussi timidement des partisanes dans les régions en développement, à l’instar de l’Amérique du Sud, de l’Afrique ou encore de l’Inde. Toutefois, il se distingue de l’écoféminisme occidental par son approche plus sociale. En effet, figure incontournable de l’écoféminisme indien, Vandana Shiva dénonce les impacts économiques ainsi que les conséquences de la domination coloniale puis de la mondialisation sur le développement des pays du Sud et, in fine, sur la place de la femme dans la société. Elle affirme qu’aujourd’hui les séquelles du passé colonial et la logique capitaliste tend à compromettre les activités traditionnelles confiées aux femmes telles qu’aller chercher du bois ou de l’eau dans ces pays.

En plus de cette dépossession quant à leurs activités quotidiennes, les femmes dites du Tiers-Monde sont souvent tenues pour responsable de la surpopulation mondiale dans l’esprit occidental, phénomène qui contribuera fortement à la crise environnementale qui nous menace. Vandana Shiva pointe du doigt cette tendance à la naturalisation de la femme qui conduit à penser que cette dernière ne détient aucune connaissance en matière de contrôle des naissances.

La nature au prisme du genre

Cette naturalisation de la femme contre laquelle Vandana Shiva s’élève, fait écho avec un des fondements du féminisme traditionnel : le refus du discours dominant cantonnant la figure féminine à sa condition naturelle. Pour les féministes des années 70, la nature biologique de la femme constituerait un prétexte pour la société mâle permettant de justifier et de pérenniser la domination patriarcale. Ce dualisme associant la femme à la nature et l’homme à la culture provient originellement de la science moderne. 

Questionnant la naturalité du sexe et du genre, Simone de Beauvoir conclut qu’« on ne naît pas femme, on le devient ». D’après la philosophe, se réclamer du « deuxième sexe » est donc le fruit d’une construction sociale selon le paradigme existentialiste, et ne se résume donc pas à correspondre à quelconque « nature féminine » innée.

Or, force est de constater que l’écoféminisme tend implicitement à reconnaître cette dichotomie et, ainsi, à revendiquer que les femmes seraient plus sensibles à la nature que les hommes. Il en résulte que nombreuses sont les critiques envers ce courant féministe qui dénoncent son essentialisme (l’essence précède l’existence). C’est précisément et en partie à cause de cette prise de position de l’écoféminisme américain que le mouvement n’a pas connu une forte adhésion en France dans les années 80.

À ces accusations, les militantes écoféministes répondent que leur ambition n’est pas de dissocier la femme de la nature pour la rapprocher de l’homme et de la culture, au risque de tomber dans l’antinaturalisme, autrement dit, de tourner le dos à la nature (compris ici dans le sens environnemental du terme), mais bien d’engager un rapport différent avec elle.

Ce nouveau rapport passe par une nouvelle éthique, celle du care (prendre soin, en anglais). Le care est essentiellement fondé sur les valeurs d’empathie et de responsabilité, notamment lorsqu’il s’agit des impacts d’une décision sur la communauté et l’environnement. Le problème est qu’il est généralement assimilé aux activités et aux professions féminines (ex : infirmière, aide-soignante, assistante maternelle) souvent mal considérées dans la société. Or, Fisher et Tronto démontrent que le care devrait être du ressort de toutes et tous, et non pas attribué à un genre spécifique, puisque seule l’adoption de cette nouvelle éthique commune permettrait à l’humanité de supprimer les logiques de domination et de préserver la planète collectivement.

En somme, l’écoféminisme se présente comme un courant féministe aspirant à dépasser tout type de dualisme (femme/homme, culture/nature) dans l’ambition de chercher à éclaircir le rapport de la femme et de l’homme avec la nature.

Vers un alourdissement de la charge mentale féminine ?

Manifestation d’une part des inégalités existantes entre femme et homme, la charge mentale témoigne de la division sexualisée du travail qui date, d’après Yuval Noah Harari dans Sapiens : Une brève histoire de l’Humanité, de l’ère paléolithique. L’écrivain avance que « nos habitudes alimentaires, nos conflits et notre sexualité sont tous le fruit de l’interaction de nos esprits de chasseur-cueilleur et de notre environnement post-industriel actuel, avec ses mégalopoles, ses avions, ses téléphones et ses ordinateurs ». 

La réflexion de Nora Bouazzouni dans son ouvrage intitulé Faiminisme converge avec celle d’Yuval Noah Harari. Elle démontre que la charge mentale que ressentent les femmes d’aujourd’hui provient de la culture sédentaire de celles-ci issue de l’époque paléolithique. Plus encore, la journaliste et écrivaine soutient qu’à cette charge mentale s’ajoute une « charge morale », c’est-à-dire une conscience écologique, souvent couplée à une culpabilisation écologique, qui serait plus prononcée chez les femmes que les hommes.

En effet, bien que les nouvelles technologies aient permis de réduire le temps dédié au travail domestique, nombreuses sont les femmes qui consacrent désormais leur temps à chercher comment réduire l’empreinte carbone de leur ménage sur l’environnement et les effets nuisibles des produits industriels sur leur santé et celle de leur proches en étudiant les étiquettes à la recherche de composants potentiellement néfastes ou encore en fabriquant leurs propres produits ménagers bio à l’instar de la lessive.

Aussi, si l’écoféminisme prétend que davantage de parité concourrait à une meilleure protection de l’environnement et une société plus égalitaire, il n’en reste pas moins qu’à ce jour l’écologie demeure une préoccupation majoritairement féminine, y compris sur le plan politique comme en témoigne une forte féminisation du vote vert aux dernières élections européennes où 17% des femmes ont voté EELV contre 9% des hommes.

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Sources :

d’Eaubonne Françoise. La mère indifférente. In: Les Cahiers du GRIF, n°17-18, 1977. Mères femmes, 25-28.
Harari, Y. N. (2015), Sapiens : Une brève histoire de l’humanité, Paris, éd. Albin Michel, 2 septembre 2015, 55
Larrère, C. (2015). La nature a-t-elle un genre ? Variétés d’écoféminisme. Cahiers du Genre, 59(2), 103-125.
Larrère, C. (2017). L’écoféminisme ou comment faire de la politique autrement. Multitudes, 67(2), 29-36.
Le Breton, M. (2019). Avec l’écoféminisme, l’avenir des femmes et de la planète n’a jamais été aussi lié. Huffpost, [en ligne].
Franceinfo (2019). Européennes : comment ont voté les Français. Franceinfo, [en ligne].

L’écologie, une histoire ancienne

Par Mark Tinkovitch

L’écologie n’a rien d’une tendance récente. Elle est au contraire une pensée qui n’a eu de cesse d’évoluer à travers l’Histoire. En effet, l’idée de préserver l’environnement est une idée aussi vieille que le monde. Son entrée dans les affaires politiques remonte à plusieurs siècles… Découvrez l’histoire de l’écologie. 

Une illustration de Baptiste Hamelin
La France, une pionnière en la matière

Nous sommes au Moyen-âge. En Europe, alors que les pays sont affaiblis par les épidémies et les guerres, un royaume se distingue de tous les autres. C’est la France. Bien avant la Cop de Paris, la France médiévale examinait avec sérieux les enjeux d’une politique environnementale. Le roi Philippe VI, préoccupé par les forêts de son domaine royal, promulgua en 1346 l’ordonnance de Brunoy. Ce texte plaçait sous sa protection les étendues forestières, ce qui inscrivait la nature comme un patrimoine à défendre. 

Trois siècles plus tard, ce serait au tour d’un autre Français, le ministre le plus célèbre de Louis XIV, d’approfondir la protection des forêts. Son nom est Colbert. Il lança en 1669 la Grande réformation des forêts. Son intention était de transmettre un héritage naturel aux générations suivantes. Par ces efforts, le royaume de France devançait de très loin le rapport de Brundtland qui définirait plus tard, en 1987, le développement durable comme un développement qui ne compromettrait pas « la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». 

L’Amérique, bien avant Trump

Au XVIIIe siècle, le philosophe Rousseau se dévouait tout entier à la nature. Mais la préoccupation environnementale ne se limita pas qu’au royaume de France. Elle survola l’Atlantique, pour arriver aux colonies américaines. En 1739, Benjamin Franklin, un des futurs pères fondateurs de l’indépendance, déposait une pétition à l’assemblée de Pennsylvanie pour dénoncer l’accumulation des déchets dans les rues. Dans ce texte, Franklin évoquait les publics rights, les droits des citoyens, comme intimement liés au cadre d’un environnement sain. Le respect de l’environnement et le tri des déchets étaient donc déjà ancrés dans les exigences citoyennes trois siècles avant nous !

Le XIXe siècle fut porté par une immense transformation : la révolution industrielle. Avec ce qu’elle engendra en idées nouvelles mais aussi en inquiétudes à l’égard de l’influence de l’action humaine sur la nature, un nouvel essor appuya l’écologie. Alors que les usines envahissaient le paysage urbain, l’écrivain américain Thoreau préférait se réfugier dans la nature. En 1854, il acheva son livre Walden ou la Vie dans les bois. Encore aujourd’hui, cet ouvrage demeure une véritable référence pour les écologiques. L’auteur y narre son expérience et sa vie au fond des bois et célèbre la vie dans la nature. 

Dix ans après Thoreau, George Perkins Marsh publie L’Homme et la Nature. Dans cette étude, Marsh livre un constat fondamental : il énumère les preuves de l’influence négative de l’activité humaine sur l’environnement. 

L’écologie n’était pas une lubie de lettrés. Au contraire, elle faisait son cours dans les couloirs politiques. Le président Lincoln avait par exemple placé sous la protection étatique la vallée du Yosemite, afin de la préserver des intérêts industriels privés. 

L’Ökologie allemande et ses influences

Il faut toutefois attendre 1866 pour qu’un zoologiste allemand, Ernst Haeckel, formule le terme « écologie ». Le mouvement avait enfin trouvé son appellation. Dans le même laps de temps, des actions emblématiques se multiplièrent sur le territoire américain. En 1872, le parc national de Yellowstone commença à être administré. En 1892, la première ONG consacrée à la nature, le Sierra Club, vit le jour. Eh oui, quand on pense aux discours climato-sceptiques actuels à la Maison Blanche, on pourrait presque s’étonner qu’auparavant, les États-Unis étaient des pionniers dans l’écologie… Et pourtant… 

Le temps des catastrophes

Les deux guerres mondiales ne suffirent pas à supprimer l’écologie des préoccupations publiques. Ni même la guerre froide ; la très connue association World Wildlife Fund naquit en 1961, au Royaume-Uni. En 1967, une marée noire apparut après le naufrage du pétrolier Torrey Canyon. 123 000 tonnes de pétrole étaient déversés sur 180 kilomètres de côtes britanniques et françaises. Les images impressionnantes de ce désastre choquèrent l’Europe et renouvelèrent l’envie de défendre la nature. 

Peu de temps après, en 1970, 20 millions de personnes marchèrent aux États-Unis. Le jour choisi était un 22 avril, proclamé Jour de la Terre, date qui est toujours d’actualité. La préoccupation environnementale atteignait progressivement les institutions internationales. C’est pour cette raison que, l’année suivante, l’ONU signa la convention de Ramsar pour protéger les zones humides. À une échelle plus réduite, des gouvernements fondaient un ministère consacré à l’écologie, à l’image de la France qui attribua le Ministère de la protection de la nature et de l’environnement au gaulliste Robert Poujade. 

Environnement, à l’international

1972 fut l’année du tournant. D’une part, les Nations Unies se réunissaient pour le premier sommet de la Terre à Stockholm et initiaient le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE). D’autre part, une publication, le Rapport Meadows, tirait la sonnette d’alarme. Ce texte, commandé par le Club de Rome, attirait l’attention sur les limites à la croissance, affirmant que la croissance économique sans limites nuirait à l’environnement. 

En 1987, le rapport Brundtland proposa une définition officielle du développement durable. L’année d’après, le GIEC fut fondé par les Nations unies. Ce groupe d’experts était chargé d’examiner l’évolution du climat. Aujourd’hui toujours, ses rapports orientent les priorités environnementales et servent d’indications aux gouvernements du monde. En 1989, la marée noire de l’Exxon Valdez au large des côtes de l’Alaska révolta une partie de l’opinion américaine. La même année, la convention de Bâle fut ratifiée, avec pour objectif limiter la circulation des déchets dangereux. Trois ans plus tard, en 1992, les Nations unies se réunirent au deuxième Sommet de la Terre, à Rio. En parallèle, 7 000 ONG, venant de 165 pays, se concertèrent pour préparer une ébauche du futur protocole de Kyoto.

Après maintes réunions mitigées et de sommets frustrants, la COP21 de Paris parvint à déboucher sur un consensus en 2015, consensus remis en cause par le président américain Donald Trump. 

Nous pouvons donc voir que lentement et patiemment, l’écologie a transcendé les siècles. L’écologie n’est pas l’affaire d’une génération ; rois et ministres avaient compris son importance en leurs temps, nous préparant le terrain pour l’avenir. 

Sources

Acot Pascal, Histoire de l’écologie, Presses universitaires de France, Paris, 1988, 288 p.

Bertrand Georges, Bertrand Claude, Une géographie traversière. L’environnement à travers territoires et temporalités, Paris, Arguments, 2002, 311 p. 

Chassagne Pierre – Développement durable. Pourquoi ? Comment ?, Aix-en-Provence, Edisud, 2002, 189 p. 

Dajoz Roger, Précis d’écologie, Dunod, Paris, 1972, 434 p.

Deléage Jean-Paul, Une histoire de l’écologie, Seuil, Paris, 1991, 330 p.

Meadows D.H. et al. – Halte à la croissance ?, Paris, Flammarion, 1972.

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Consommer Zéro Déchet à Aix-En-Provence

Un article de Romain, auteur du blog Koukarin

Quand on s’inscrit dans une démarche écoresponsable en tant que consommateur, c’est parfois le parcours du combattant. Il faut souvent sortir sa carte au trésor et partir à l’aventure pour trouver la perle rare. Il n’est pas (encore) si facile d’acheter des produits qui respectent nos valeurs.Et quand on cherche un commerce inscrit dans une démarche zéro déchets à Aix-en-Provence, on en vient vite à se creuser le cerveau. Alors, avant d’avoir la marmite qui chauffe, on vient vous donner un coup de main.. Eh oui, on a listé tous les bons plans pour consommer zéro déchets à Aix-En-Provence !

Faire Ses Courses…

Dans les produits de grande consommation, la mode est au double voire au triple emballage. Une fois tout déballé, notre poubelle est souvent plus remplie que notre frigo…
Y’a comme un problème non ? Dans cet enfer du suremballage, il reste quand même des irréductibles commerces soucieux de la planète.
Bio d’ici est la référence de l’épicerie engagée dans le zéro déchet à Aix-en-Provence. En plus de vendre des produits à 95% issus d’acteurs locaux et bio, Nathalie et Jean-Yves ont axé leur concept sur le vrac. On y trouve un peu tous les produits présents dans une épicerie traditionnelle avec en plus des produits d’entretien, d’hygiène, cosmétiques, du pain, des boissons… C’est vraiment le commerce idéal pour faire ses courses de la semaine. Situé rue d’Italie, Bio D’ici vous accueillera à bras ouverts ! Frume est une alternative possible, rue des Cordeliers, mais ne propose pas autant de choix. On peut y acheter d’excellents légumes.

Un Resto Zéro Déchet à Aix-en-Provence ?

On ne va quand même pas manger tous les jours à la maison pour être sûr de respecter une démarche zéro déchet ! Être éco-responsable ne se résume pas à vivre en ermite dans une grotte histoire d’être sûr de rester en phase avec ses valeurs.

C’est d’ailleurs pour ça que le label Sekoia existe : permettre de voir où en sont les commerçants dans leur engagement. Et ça tombe bien car on trouve aussi des restaurants engagés dans le zéro déchet à Aix-en-Provence. Si vous vous baladez rue Paul Bert, vous tomberez sur un super restaurant fast-food au doux nom de Bigbrod. On y trouve des tartines très appétissantes et des salades à composer soi-même. C’est parfait pour des midis gourmands et sur le pouce. Si vous passez devant, n’hésitez pas à faire remplir votre gourde… du moment qu’elle n’est pas à usage unique 😉

Une autre option au 3, rue Emeric David s’appelle Green Bowl. On y mange de bons repas faits maison, healthy et qui font voyager. Leurs bols et autres contenants à emporter sont consignés afin d’éviter tous déchets inutiles ! Bigbrod et Greenbowl proposent des réductions pour les clients qui amènent leur propre contenant. Et en bonus, pour lutter contre le gaspillage alimentaire, on les retrouve tous les 2 sur Too Good To Go ! On peut aussi citer le restaurant Oni qui propose un savoureux mélange de cuisine Japonaise, Australienne et Française.


Les Autres Achats En Mode Zéro Déchet !

D’habitude, les mots « mode et tendances » ne riment pas vraiment avec écologie… Mais, écolo ou pas, on porte tous des fringues. Il faut donc bien en acheter quelque part ! Luce D’Angueuse est une boutique très sympa située 31 rue des Cordeliers. En plus de proposer de jolies pièces, on peut payer en monnaie locale (en l’occurrence La Roue). Elle sert aussi de comptoir d’échange pour cette monnaie et propose le remplissage de gourde pour les passants.

Un autre immanquable est Lili Accessoires qui accepte aussi La Roue, remplit la gourde des passants assoiffés. Mais aussi et surtout, tous les articles sont fabriqués en France. Acheter Chez Lili, c’est donc soutenir toute une économie Locale.

Et n’oublions pas Instant V, une pâtisserie végétale qui stimulent les papilles des gourmands (vegan ou pas). Mathilde et Quentin ont lancé leur projet place d’Arménie, 1 rue Roux Alpheran. Ils sont sensibles à une consommation responsable et sont sur la bonne voie. C’est pour l’instant le meilleur endroit pour manger des pâtisseries dans l’esprit zéro déchet à Aix-En-Provence.

On vient de vous présenter les commerces les plus zéro déchet friendly… Comme vous le voyez, ce n’est plus mission impossible de faire ses courses, aller au resto ou s’habiller selon des valeurs écoresponsables. On espère vraiment voir cet article évoluer d’année en année avec toujours plus de commerces engagés. Si vous avez un bon plan zéro déchet à Aix-En-Provence, partagez-le dans l’espace commentaire juste en dessous.


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Eclairage à perte de vue

Villes, animaux sauvages et pollution lumineuse

Par Sarah Gay

Pollution VS pollutions

Lorsque l’on entend pollution on pense avant tout à la qualité de l’air ou encore au traitement des déchets. Pourtant celle engendrée par les éclairages n’est pas négligeable et participe à la dégradation de la biodiversité. Alors que nous traversons une véritable crise écologique il n’est pas rare de voir des vitrines de commerces encore illuminées durant la nuit ou encore les éclairages publics se multiplier. Or ces nombreux éclairages qui consomment énormément d’énergie semblent aberrants compte tenu des défis environnementaux face auxquels nous sommes confrontés.

Illustration de Baptiste Hamelin

Cet excès nocturnes de production lumineuse artificielle n’est pas sans conséquences puisque l’on sait qu’elle peut représenter non seulement un danger pour notre santé mais aussi pour la faune, la flore et les écosystèmes.  Cette problématique témoigne d’un mode de vie de plus en plus éloigné des cycles naturels et où la nuit n’a plus sa place. Le rythme infernal de la société de consommation ne trouve jamais de répit. Nous sommes sans cesse incité à consommer par une forme publicité permanente que ce soit certaines enseignes ou encore des panneaux publicitaires qui consomment de l’énergie même durant les heures nocturnes. On sait en outre que l’éclairage est le deuxième point d’investissement d’une collectivité. Confrontés aux nouveaux enjeux écologiques les acteurs publiques et privés ne devraient-ils pas prendre leurs responsabilités et cesser d’engendrer de tels dommages pour l’environnement ? Alors que ces dépenses énergétiques sont largement évitables. Ainsi certains intérêts économiques et commerciaux continuent de primer quitter à perpétuer des pratiques grandement dommageables. Ces magasins vont même jusqu’à être dans l’illégalité car depuis l’arrêté du 27 septembre 2018 pour éviter les nuisances lumineuses, les commerces et autres locaux professionnels doivent éteindre leurs lumières une heure après que les personnes y travaillant l’aient quitté. Depuis la dernière décennie les scientifiques se sont emparés de cette question et en ont démontré les effets nuisibles. Elle provient en particulier des activités humaines et des éclairages des villes que nous avons mis en place dans nos villes qu’il s’agisse de lampadaires, phares de véhicules ou panneaux publicitaires. Ce qui est étroitement lié au processus croissant d’urbanisation avec des villes qui s’étendent de plus en plus. En outre l’expansion de la lumière artificielle est rapide quand on sait que les superficies touchées s’étendent environ de 6% par an. En 2016 plus de 23% de la surface totale du continent était soumise à cette pollution lumineuse de même qu’un tiers de l’humanité ne voit plus la voie lactée. Il faut savoir que certains éclairages bien que nécessaires car garantissant la sécurité des citoyens sont souvent de mauvaise qualité ce qui augmente la photo pollution. 

Des conséquences néfastes sur les écosystèmes

En effet l’alternance entre le jour et la nuit est cruciale pour de nombreuses espèces. La lumière et ses cycles a une influence sur bon nombre de processus physiologiques, de comportements et d’interactions au sein des écosystèmes. A l’image des tortues marines qui attendent la nuit avant d’éclore car les nouveaux nés se servent du reflet de la lune sur l’océan pour se repérer et rejoindre l’eau ce qui est mis en péril par la présence d’éclairage sur le littoral.  Or on sait que l’obscurité de la nuit est de plus en plus réduite par la lumière artificielle. Ces effets sont loin d’être nouveaux car déjà on constatait dans les années 1920 une mortalité massive d’oiseaux à proximité des phares maritimes. La pollution lumineuse va entraîner deux types de comportements distincts chez la faune, l’un répulsif l’autre attractif. Le premier va se caractériser par un éloignement de la source de lumière, ce qui va pousser certaines espèces à migrer. Le comportement attractif lui se manifeste comme un rapprochement de la source lumineuse chez les animaux nocturnes. Or comme on l’a mentionné avec les tortues cela provoque une désorientation en particulier chez les oiseaux. 

Comment lutter ?

Des solutions existent et permettraient de lutter contre cette pollution dans le long terme que ce soit par la mise en place de politiques efficaces à toutes les échelles (nationale ou encore municipale) ou l’installation de certains dispositifs. L’un des remèdes proposés par le scientifique Jean-Philippe Siblet serait le réaménagement des équipements lumineux avec un éclairage vers le sol ou l’installation de détecteurs sur les lampes pour éviter l’éblouissement. Il parle également de faire disparaître les lampes à vapeur de mercure qui consomment beaucoup d’énergie et sont très nocives pour la biodiversité et de leur substituer des lampes au sodium basse pression. D’autres solution ont également été proposées notamment par la Revue Médicale de Liège qui propose l’installation massive de lumières automatiques ou encore de choisir des lumières avec une composition spectrale davantage rouge ou verte. Il faut également garder à l’esprit que les nuisances lumineuses sont avant tout liées aux activités humaines et qu’une prise de recul sur nos habitudes de vie est nécessaire. Ce qui passe par une sensibilisation du plus grand nombre à une problématique dont on parle très peu mais qui pourtant fait beaucoup de dégâts…

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Covid-19: quel avenir pour le Green Deal ?

Par Valentine Barelier

Coronavirus : un souffle d’air frais ?

Des dauphins sur les côtes italiennes, une eau claire dans le canal de Venise ou encore des cartes témoignant du faible niveau de pollution en Europe comme en Asie…nous avons tous pu voir ces images sur les réseaux sociaux. Sur le court terme, il semble donc que la crise mondiale du Coronavirus ait eu des conséquences positives sur l’environnement. Sur le long terme en revanche, les effets de cette crise sanitaire sont plus incertains. Au cœur des préoccupations se trouve le fameux Pacte Vert pour l’Europe, connu sous le nom (plus sexy) de European Green Deal. 

Si les optimistes voient dans cette crise une opportunité de créer une stratégie de relance, verte et juste, les plus pessimistes pointent du doigt les difficultés à trouver les ressources matérielles nécessaires. 

mais alors, Quel avenir pour le Green Deal européen ? 
Illustration de Baptiste Hamelin
Le Green Deal, what is it? 

Le Green Deal a été lancé le 11 décembre 2019 par l’Union Européenne. Son objectif : réduire à zéro les émissions nettes de carbone de l’Union Européenne d’ici à 2050. Un peu lointain comme objectif, mais c’était un bon début. Et en plus, c’était bien parti !  

En janvier 2020, un mois après l’annonce du Green Deal, la Commission Européenne a proposé un règlement instaurant le « Fonds pour une transition juste ». Ce fonds devait permettre d’apporter un soutien aux régions faisant face à des défis socio-économiques dans la transition écologique. Le 4 mars 2020, elle proposait sa Loi climat dont l’objectif était d’inscrire la neutralité climatique dans le droit européen des Etats-Membres. Enfin le 11 mars 2020, la Commission a adressé son « nouveau plan d’action pour une économie circulaire – pour une Europe plus propre et plus compétitive ». 

Autant d’initiatives qui se sont cependant heurtées à la crise sanitaire mondiale du Covid-19. Le Green-Deal a alors été couvert dans de nombreux médias comme n’étant plus la priorité politique de l’Union Européenne. Mais rapidement, des voix se sont élevées, appelant à la « relance verte ». 

Le Green Deal menacé par le Covid  

Le Green Deal a été fortement ébranlé par la crise sanitaire et son avenir est devenu plus que jamais incertain. Selon Francesca Colli, chercheuse à l’institut Egmont à Bruxelles, trois conséquences sont à craindre :

  • Un manque de soutien de l’opinion publique 

Le climat d’incertitude créé par la crise sanitaire et l’acharnement médiatique sur le Covid ont détourné l’attention publique du Green Deal. Les gouvernements nationaux risquent donc de ne plus bénéficier des soutiens de l’opinion publique à l’égard des questions climatiques. 

  • Des conséquences majeures sur l’économie 

La pandémie et les mesures qui ont été prises ont eu un impact évident sur l’économie mondiale. La crise économique qui s’apprête à toucher l’Europe va pousser les gouvernements à mobiliser des milliards d’euros, relayant ainsi les questions environnementales au second plan. 

Une autre conséquence à craindre, est que la récession économique soit prise comme une excuse par les entreprises ou par les gouvernements pour démanteler ou reporter la mise en œuvre des réglementations environnementales. Cela a déjà commencé : les constructeurs automobiles font pression sur l’UE pour retarder les consultations sur la mise en œuvre des objectifs en matière d’émission et les transformateurs de matières plastiques demandent de retarder la mise en œuvre des plastiques à usage unique. 

  • Un manque de confiance en l’Union Européenne 

Enfin, une dernière conséquence peut être celle d’un manque de confiance en l’Union Européenne mais également d’un manque de confiance entre états-membres. Or, un manque de cohésion dans l’Union Européenne peut complexifier les négociations sur les mesures climatiques que l’Union Européenne a besoin de prendre. 

La crise du Covid-19 : une occasion unique pour le Green Deal ? 

Malgré ces défis majeurs, la crise du Covid-19 pourrait également être une opportunité unique pour l’Union Européenne. 

Effectivement, dans le prolongement de ce qu’Edgar Morin appelle la communauté de destin, la crise sanitaire nous a permis de prendre conscience que nous sommes tous liés et que l’individualisme ou l’isolationnisme ne résoudront rien. Le New Deal de Franklin D. Roosevelt a été créé en réponse à une crise économique alors sans précédent aux Etats-Unis. La crise actuelle n’est pas due au changement climatique, mais le Green Deal européen pourrait néanmoins soutenir la reprise. De plus, si la reprise est correctement mise en œuvre, elle pourrait contribuer à la transition vers une économie à faibles émissions de carbone. 

D’ailleurs, une « alliance pour la relance verte » a été lancée au Parlement Européen, composée, entre autres, de députés européens, de chefs d’entreprises et de syndicats. Cela est venu après la signature par 17 ministres de l’environnement des Etats membres de l’Union Européenne, réclamant à ce que le Green Deal soit mis au centre de la politique de relance post Covid-19.

En saisissant l’occasion de repenser et de reconstruire l’économie conformément aux principes du Green Deal, l’UE peut faire en sorte que la reprise soit verte, juste et solidaire. 

Sources : 

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Un nouveau réveil écologique : la vague Greta Thunberg

Par Marine Hamelin

Illustration d’Olivia Dupros
Le visage de GRETA : stop à l’hypocrisie climatique

Au cours des deux dernières années, certains – y compris moi – ont pu avoir le sentiment d’une explosion de l’engagement environnemental. Et pour cause, on a assisté à un engouement sans précédent derrière la figure fédératrice de la seule, l’unique : Greta Thunberg.

« Des gens souffrent, des gens meurent, et des écosystèmes s’écroulent. Nous sommes au début d’une extinction de masse, et tout ce dont vous parlez c’est d’argent, et de contes de fées racontant une croissance économique éternelle. Comment osez-vous ? »

C’est avec ces mots forts que l’activiste danoise de 16 ans prend la parole lors du sommet pour le climat de l’ONU, à New York. Elle interpelle sur leur inaction face au réchauffement climatique les dirigeants étatiques qui lui font face, et se faisant, s’érige en porte-parole de toute une génération. Avec son mouvement Fridays for Future, elle est devenue une figure incontournable des mobilisations climatiques et ce en moins de 2 ans. 

Pourtant les mobilisations écologistes ne sont pas un phénomène nouveau. Elles prennent leurs racines dans le mouvement altermondialiste qui caractérise les années 70. Se rassemblent alors toutes sortes de causes. Parmi elles, la contestation antinucléaire civile comme militaire, une lutte anticapitaliste qui s’érige globalement contre le modèle états-unien, la lutte féministe qui peut enfin bénéficier d’une libération de la parole à l’instar des luttes pour les droits civiques…  

Alors que s’est-il passé entre août 2018, ce moment où l’écolière a décidé de mener une grève scolaire, et de s’installer fièrement avec une pancarte face au parlement danois, et aujourd’hui ?

Dans un entretien avec Caroline Miranda, le sociologue Bruno Latour donne une analyse pertinente de cette image. « Elle me bouleverse, avec cette façon complètement non conventionnelle d’être totalement convaincante. Vous avez raison, sa façon d’inverser l’ordre des générations, de dire que ce sont les enfants qui sont sages et mûrs et les adultes qui sont des gamins inconscients […] investit tous les affects. Il n’y a pas si longtemps, les « générations futures » qu’il fallait protéger, elles étaient dans le futur justement, et même le futur lointain, c’était tout le problème, maintenant elles sont derrière nous, dans la rue, et elles vous mettent l’épée dans les reins. Toute question de génération, d’ordre des générations, c’est le cœur de la question de l’engendrement. »

La clef du succès : le recours à l’émotion

On assisterait alors à un inversement du paradigme générations futures/générations présentes qui donne une nouvelle dynamique au mouvement. La force des discours de Greta Thunberg réside aussi dans sa capacité à mobiliser l’émotion. Et, en plus de ce registre de l’émotion, Greta en appelle aussi à celui de l’expertise scientifique pour gagner la légitimité que l’on accorde à cette dernière. Elle reprend les déclarations scientifiques faites depuis des décennies et tire la sonnette d’alarme sur la situation dramatique du changement climatique. Cela lui permet de parler d’égal à égal avec les dirigeants, et de mobiliser derrière ses pancartes « Youth for Climate ».

Très rapidement, dès la fin 2018, on a vu les premiers mouvements d’action collective apparaitre, en reprenant l’expression de grèves scolaires pour le climat. Ce mouvement, en étant non-violent et apolitique, permet à tous de se mobiliser. Il touche de plus en plus, y compris d’autres types d’organisations. Entre autres sont présents des mouvements de justice pour le climat, qui apportent une expertise juridique. En France, il y a « L’affaire du siècle », dans laquelle 4 associations s’attaquent directement à l’Etat français.

En plus de toute cette diversité qui vient consolider le mouvement, l’engagement environnemental a ça de particulier qu’il implique des actions de tous les jours, qui viennent forger l’engagement durable à tous les niveaux. Cela passe par la suppression du plastique dans un mode de vie zéro déchet, la diminution de nos émissions carbones, une consommation plus locale, éthique… On boit dans une gourde, on fait le marché avec nos sacs en tissu, on se lave avec du vrai savon de Marseille… On labellise les commerçants aixois ! Bref, l’engagement touche à tous les aspects de notre vie. 

Un symbole pour la jeunesse

Malgré les critiques qui peuvent lui être adressées, Greta Thunberg est parvenue à donner un écho aux propos des scientifiques, et à redonner de la vigueur aux promesses des dirigeants qui assuraient atteindre des objectifs ambitieux lors de la COP21 de Paris.

Elle a engendré une réelle prise de conscience dans le monde, où dans certains cas permis de révéler une conscience déjà en éveil. On le voit à de nombreuses échelles. A l’échelon d’une génération, avec ces mobilisations collectives, mais aussi au niveau des institutions de la décision publique. La Commission européenne a annoncé son « Pacte vert pour l’Europe », et on retrouve un peu partout des nouvelles lois qui démontrent de l’aboutissement progressif de ce mouvement comme en France avec la loi économie circulaire.

Cependant, le système en place est ancré profondément, et il peut sembler inquiétant de voir un retour en force des lobbies du plastique dès la première occasion, comme c’est le cas de nos jours avec la crise du covid-19. Nous devons alors espérer que cette nouvelle génération, qui se lève massivement pour critiquer les erreurs du passé parviendra à enraciner un nouveau monde, plus en harmonie avec les écosystèmes qui le composent.

Sources :
Discours de Greta Thunberg, le 23 septembre 2019, à l’ONU
« Troubles dans l’engendrement. Entretien sur la politique à venir », Revue du Crieur, vol. 14, no. 3, 2019, pp. 60-73.
« Le Pacte Vert pour l’Europe : faire de l’Europe le premier continent climatiquement neutre d’ici à 2050 », 11 décembre 2019
Moisan, Dorothée. « A la faveur de la crise sanitaire, le plastique à usage unique fait son retour en force », Le Monde, 12 avril 2020
Ollitrault, Sylvie. Militer pour la planète, 2008

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L’éducation au développement durable dans la petite enfance

Et si les jeunes enfants pouvaient avoir un impact encore plus important que nous le pensions sur la voie du Développement Durable ?

Par Maëlle Dupré

Illustration d’Olivia Dupros
L’ODD 4 : pour un renforcement de l’éducation

Les études de l’UNESCO et de l’OMEP (Organisation Mondiale de l’Éducation Préscolaire) ont montré l’importance de l’enseignement primaire si nous voulons voir un véritable changement de paradigme vers un monde plus durable. L’objectif de développement durable n°4 révèle que l’accès à une éducation de qualité, inclusive et égalitaire doit passer par le renforcement de l’éducation de la petite enfance (EPE). 

Objectif de Développement Durable n°4
Agenda 2030 – ONU

En effet, c’est au cours de la petite enfance et à une vitesse folle que se développent les fondements de nombre de valeurs et de comportements fondamentaux d’une personne. Ils forment la plupart de leurs habitudes entre 3 et 8 ans au sein de la famille et à l’école. Ils développent alors par eux-mêmes l’esprit critique, la réflexion et la créativité. Selon les recommandations de l’université de Göteborg, nous devons dépasser l’idée que l’aspect le plus important de la petite enfance est de positionner les enfants dans un environnement sûr et protégé où ils peuvent jouer innocemment et ne pas être affectés par les événements qui les entourent. 

C’est pourquoi l’éducation au développement durable (EDD) a été si délicate à mettre en œuvre dans les crèches et les écoles primaires. Les enseignants et les parents de la petite enfance ont pensé que le développement durable était un sujet de discussion déprimant et effrayant, trop lourd à porter pour les jeunes enfants. En réalité, ils sont des agents actifs de leur propre vie et sont plus touchés par les questions environnementales et sociales dans leur vie quotidienne que nous le pensons. En outre, des soins et une éducation efficaces pour la petite enfance peuvent donner aux enfants de meilleures chances de compenser le handicap qui accompagne la pauvreté et la malnutrition dans les pays moins développés. Et il est largement admis « qu’aucun développement durable n’est possible sans s’attaquer aux problèmes de la pauvreté » (Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, 2002).

Alors qu’est-ce que l’Éducation au Développement Durable, comment on l’adapte à la petite enfance et pourquoi c’est si important ?

L’EDD repose sur les trois piliers de la soutenabilité et tente de mettre en œuvre une vision de l’enseignement et de l’apprentissage qui adapte le bien-être humain et économique aux traditions culturelles et au respect de l’environnement. La complexité de l’EDD est qu’elle ne nécessite pas seulement une modification des programmes et des activités scolaires. Elle se caractérise par une approche holistique, interdisciplinaire et multiméthodique qui encourage l’apprentissage expérimental et social, mais aussi la créativité, l’esprit critique et la prise de décision.

L’Education et Protection de la Petite Enfance pour le Développement Durable (EPPEDD) doit être ancrée dans la réalité locale des jeunes enfants et impliquer la participation des familles mais aussi de la communauté et des municipalités. 

L’EPPEDD se place du point de vue de l’enfant, leurs idées sont prises en considération et construisent le contenu de l’apprentissage. Les enfants sont ainsi considérés comme des acteurs qui peuvent participer aux changements environnementaux. Cela les sensibilise mais aussi améliore le dialogue entre eux et les éducateurs.

En outre, elle devrait intégrer l’apprentissage de l’altruisme, de la compassion, de l’équité et de l’égalité en ce qui concerne le genre, les nationalités, les ethnies, les religions et les cultures.

Enfin, l’EPPEDD est principalement fondée sur l’éducation environnementale, mais elle devrait être plus large que le simple fait d’emmener les enfants à l’extérieur pour leur faire découvrir la beauté de la nature. Elle doit inclure leur possibilité de découvrir les problèmes environnementaux et d’exprimer leurs solutions et alternatives créatives. 

Alors que le besoin d’une plus grande soutenabilité devient évident dans le monde entier, l’importance de l’inclure dans les programmes pour l’EPE l’est tout autant.

Tout d’abord, la pratique du Développement Durable permet aux enfants de construire une relation avec leur environnement et de développer des valeurs écologiques et pose ainsi les bases d’une vie d’adulte respectueuse de l’environnement. Nous devons les encourager à avoir une attitude proactive en même temps que se développe leur mentalité écologique. 

Comme nous l’avons dit précédemment, la rapidité avec laquelle les jeunes enfants absorbent les nouvelles informations met en évidence l’idée que plus les principes de l’EDD sont introduits tôt, plus leur influence est importante. Dans cette perspective, les adultes ayant des habitudes de gaspillage et non écologiques auront du mal à passer à un mode de consommation plus durable alors que les enfants ayant une attitude positive envers l’environnement vont sans aucun doute les conserver toute leur vie – le tri des déchets en est un exemple notable -. Selon Bates et Tregenza, les enfants peuvent avoir des convictions encore plus fortes que les adultes et peuvent exercer une influence sur leur famille « et donc, indirectement, sur la société ».

Par ailleurs, l’Université de Stanford, en 2017, a étudié l’effet de l’éducation environnementale sur les jeunes enfants. L’enseignement des défis environnementaux aux enfants peut non seulement améliorer leur comportement écologique, mais aussi leurs compétences. 90 % des jeunes enfants à qui l’on enseigne l’éducation environnementale ont obtenu de meilleurs résultats dans d’autres matières.

Comment est-elle mise en pratique, concrètement ?

L’OMEP a créé, en 1987 la règle des sept  » RE  » pour aider les enfants à comprendre quels principes doivent être respectés lorsqu’ils veulent agir  » durablement « . 

La règle des 7 REs pour l’EDD
OMEP

Dans le cadre de l’EPPEDD, il est demandé aux éducateurs d’utiliser ces principes RE pour développer des projets d’activités pour la durabilité. Comment cela s’est il mis en oeuvre concrètement ? 

Beaucoup d’écoles maternelles et primaires ont décidé dans les années 2000 de créer leurs propres jardins de fruits et de légumes. Dans l’école maternelle de Hallet Cove en Australie, l’idée était de laisser les enfants exprimer leurs idées en s’inspirant de photographies et de livres de jardinage sur la façon dont les jardins devraient être organisés. Ils ont créé un élevage de vers et mis au point un processus de compostage. Les récoltes étaient consommées par les enfants pour le déjeuner ou données aux personnes dans le besoin. Comme ils avaient l’ambition de devenir autosuffisants en eau et en électricité, un réservoir d’eau de pluie et des panneaux photovoltaïques ont été introduits. Les concepts d’énergie solaire et de conservation de l’eau ont été intégrés dans les activités d’apprentissage afin de  » faire des choix écologiquement durables une pratique quotidienne intégrée « . (Bates et Tregenza, 2004)

Au Brésil, l’éco-école de Vita Didonet s’appuie sur le but philosophique selon lequel il y a quelque chose au-delà de « l’utilité ». La plupart des objets jetés sont nettoyés et réutilisés pour les transformer en jouets. « Dans les mains des enfants, tout ce qui est considéré comme mort peut revenir à la vie grâce à l’imagination ». La consommation et la production de masse, l’élimination massive des déchets, ont conduit à une perception déformée de la valeur non seulement des choses mais aussi des personnes. Cette idée philosophique de la « multi-signification » peut et doit être enseignée dès le plus jeune âge, comme une orientation fondamentale tout au long de la vie.

La Scandinavie a toujours encouragé l’éducation en plein air qui fait maintenant partie de chaque programme d’enseignement préscolaire de Suède, selon les recommandations de l’Agence Nationale pour l’Education. L’apprentissage en plein air est supposé établir un lien solide entre la nature et l’enfant et constitue une occasion d’améliorer le développement physique. De nombreuses écoles maternelles en Scandinavie sont construites au milieu des forêts, ce qui permet aux enfants d’accéder à un écosystème entier sans aucune contrainte. Il a été prouvé qu’elle aide les enfants ayant des problèmes de comportement et enraciné leur engagement envers la nature. 


La Naturskolan (école de la Nature) de la commune d’Umeå en Suède

En bref, il est largement reconnu que les politiques internationales actuelles concernant le changement climatique, la perte de biodiversité, la pauvreté ou les inégalités entre les sexes ne sont pas durables. Les enfants de nos écoles maternelles seront confrontés à des défis sociaux et environnementaux majeurs. Nous devons leur garantir le droit de s’exprimer au plus tôt, de prendre soin de leur environnement et de participer à la construction d’un mode de vie responsable et durable car « les enfants ont le droit d’être impliqués et entendus dans les affaires qui les concernent  » (Convention des Nations Unies sur les Droits de l’enfant, 1989).

Sources

Bates, S., and Tregenza, N. (2004), Education for Sustainability in the Early Years: A Case Study from Hallett Cove Preschool, Australian Sustainable Schools Initiative South Australia. 
Pramling-Samuelsson, I., Kaga, Y., 2007, The contribution of early childhood education to a sustainable society
Stanford University (2017) « Stanford analysis reveals wide array of benefits from environmental education » ,
Siraj-Blatchfor, J., Caroline Smith, K. and Pramling Samuelsson, I. (2010), Education for Sustainable Development in the Early Years
UN Convention. (1989). The UN Convention on the rights of the child. New York: United Nations.
Objectif de Développement Durable n°4. ONU
La règle des 7 REs. OMEP
Naturskolan Umeaå

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